JE CROYAIS QUE LE PAYS C’ETAIT LA TERRE
extrait Les choses qui taillent à la surface mon corps
et aussi à l’intérieur
Ce travail d'écriture et d'édition rassemble une série de textes courts, initiés lors d’un séjour de plusieurs mois à Lisbonne. Ces textes sont le début d’une réflexion autour du rapport trouble à la terre et à ce que ce terme recouvre.
Pour cette première exploration, j’interroge le rapport intime et hérité que j’entretiens au Portugal, en tant que fille et petite-fille d’immigré•es portugais•es.
J’explore l’ambiguité des récits qui forment ce lien en vides, en fantasmes, en souvenirs.
À cela s’entremêle l’histoire particulière de l’agriculture urbaine à Lisbonne, dont les traces se matérialisent dans la végétation et les usages actuels du parc Casal Vistoso*.
*Ces textes font partie d’un travail plus large de collecte d’objets, de plantes et de recherche tinctoriale autour du parc Casal Vistoso.
“ 1. La manière dont le sol n’est jamais complètement plat :
on pourrait dire qu’il y a plus de pavés que de béton et les pavés contrairement au béton laissent de la place aux lacunes, aux choses molles, aux hypothèses qui soulèvent les pierres et cognent dans les oublis
2. Les sons d’une langue qui parle en trou de mémoire :
qui parle au travers des peaux mortes et pliées, au travers des sous-sols de la ville-gentrifiée
3. Les odeurs qui sont toutes des histoires qui hantent :
des objets impalpables et sans accroches, l’odeur surtout des cages d’escaliers qui creusent dans un corps jusqu’à l’amnésie
4. Les goûts qui forment l'architecture d'un pays et font aux organes comme de petites morsures :
les blancs d’oeufs qui servaient dans les couvents à empeser les habits, les robes carmélites, les nappes des autels / les jaunes qui depuis sont dans toutes les bouches / les recettes des douceurs conventuelles permises par les sucres arrachés du Brésil ”